Faire passer le lycée Freppel de lycée d'élite à lycée d'excellence : c'était
là l'un des trois chantiers que s'était fixés Guy Mielcarek. Mais quelle est la
différence ? interrogeront beaucoup. Elle est de taille, explique en substance
le proviseur : un lycée d'élite a d'excellents résultats en sélectionnant son
public. Un lycée d'excellence emmène la totalité de ses élèves au meilleur
niveau possible pour chacun, sans esprit de sélection. L'objectif était
notamment de réduire au maximum les redoublements à la sortie de la seconde.
Plutôt que d'en sélectionner les élèves, il s'agissait de les accompagner
jusqu'au bac. Le lycée est ainsi passé d'un taux de redoublement des secondes de
24% en 2004 à 12% aujourd'hui.
Ces méthodes qui répondent à un esprit
nouveau n'ont pas nui à la réputation de Freppel. Bien au contraire : avec 98%
de réussite au bac, Freppel reste l'excellent lycée qu'il a toujours
été.
Témoins de ces changements dans les évaluations, les fameux classements
tant guettés par les parents, qui établissent une hiérarchie entre les
établissements. On ne juge plus aujourd'hui le taux brut de réussite au bac. On
intègre des facteurs comme l'environnement sociologique et partant les taux de
réussite attendus, ou encore les politiques des établissements. Résultat :
Freppel est classé 1er lycée d'Alsace par le numéro d'avril du magazine
L'Express.
Sans toucher au mérite du proviseur, on dira que la tâche aura
trouvé un terrain favorable avec une population d'élèves qu'on qualifie de
facile. En revanche, il est plus délicat de faire bouger les profs.
Pas facile culturellement d'introduire le travail collectif
dans les équipes d'enseignants
Et là, c'était le 2e chantier du proviseur qui a introduit le travail
collectif dans les équipes d'enseignants. Ce qui n'est pas aisé culturellement,
reconnaît Guy Mielcarek. But de la manoeuvre : le travail d'équipe fait
progresser la pratique des professeurs. Ici, on sort de la stricte liberté
pédagogique largement défendue par le corps professoral. Mais travail d'équipe
n'est pas déni de liberté pédagogique, soutient au contraire Guy Mielcarek, qui
rappelle le premier mot du projet d'établissement : ensemble. On supposera la
tâche pas complètement aboutie si le proviseur confie y être arrivé « avec un
certain nombre d'équipes. » Ce qui rappelle l'autre rôle d'un chef
d'établissement, celui de relais de la parole institutionnelle. Le 3e chantier
de Guy Mielcarek, pas facile non plus, dit-il, est d'expliquer le sens des
textes puisque dans un établissement, personne mis à part le principal ou le
proviseur ne parle aux enseignants.
Freppel, c'est du pain béni avec une
population d'élèves largement représentative des catégories
socioprofessionnelles favorisées. Les profs sont à l'avenant : ce sont des
passionnés, dira d'eux le proviseur.
Guy Mielcarek va changer de monde. ll
rejoint à la rentrée le lycée Alphonse-Heinrich de Haguenau, un établissement
technique en pleine restructuration. Ici, plus de forts en thème mais des gars
et des filles motivés par une industrie largement partenaire de l'établissement.
Un vieux rêve et un retour aux sources pour l'ingénieur de formation qu'est Guy
Mielcarek.
« J'ai postulé sur le créneau très particulier du problème des élèves en difficulté en seconde, car au lycée Montaigne, nous travaillons depuis 2004 sur la prise en charge de ces élèves », explique Robert Strassel, le proviseur du lycée mulhousien. Cet établissement a répondu à un appel d'offres du ministère pour participer à une expérimentation sur la réduction des redoublements et des réorientations des élèves de seconde. Deux autres lycées alsaciens, Sainte-Clotilde à Strasbourg et Marc-Bloch à Bischheim, ont été retenus pour mener des expérimentations sur le même thème.
Redoublements
divisés par deux
En France, une centaine de lycées serviront à la rentrée prochaine de
terrain d'expérimentation sur « la gestion du temps et l'organisation des
classes ». Leurs moyens seront renforcés. Les lycées Montaigne et
Marc-Bloch seront dotés de trois postes supplémentaires. L'annonce des
établissements sélectionnés en France a été des plus discrètes, ce qui a attisé
les suspicions des syndicats enseignants qui voient derrière ces
expérimentations une réforme que le ministre Xavier Darcos tente
« d'imposer à nouveau », alors qu'elle a été « massivement
rejetée » (Voir ci-dessous). Pour le ministère, il ne s'agit que
« d'encourager des expérimentations pragmatiques ».
En présentant la candidature de son lycée, Robert Strassel n'a pas voulu
se placer sur le terrain politique. « Il y avait un appel d'offres pour
aider des élèves en difficulté. Peu importe que la réforme s'appelle Darcos,
Descoings... Le problème des élèves en difficulté reste là. » D'autant
plus que cette année, le lycée n'a pas pu mettre en place son dispositif de
tutorat « faute d'étudiants tuteurs ». Le proviseur espère que les
étudiants de l'UHA répondront présent à la rentrée prochaine. Le taux de redoublement
qui était de 20 % en seconde en 2002 a été ramené à 10 % et il s'agit
de ne pas perdre le terrain gagné.
Le lycée compte 380 élèves de seconde. L'idée de créer une classe de
seconde spécifique pour les élèves en difficulté a été abandonnée pour ne pas
les stigmatiser. La participation au projet national d'expérimentation va
permettre de relancer la réflexion. Le lycée devrait mettre en place des
ateliers du soir pour les élèves afin de « travailler sur la méthode,
engager un travail de réflexion sur l'orientation... Les enseignants avaient
émis des réticences sur les moyens de l'expérimentation. J'espère que ce
problème pourra être résolu avec les trois postes supplémentaires »,
indique Robert Strassel.
Au lycée Sainte-Clotilde, le directeur d'établissement Patrice Hauchard a
répondu à l'appel d'offres après concertation avec les enseignants de seconde.
« Tous les enseignants des établissements privés de France qui
participeront à l'expérimentation suivront une journée de formation le 16 juin
à Paris. » Pour Patrice Hauchard, « les axes de l'expérimentation
s'inscrivent profondément dans le projet d'établissement. On va renforcer la
question de l'accompagnement, de l'individualisation et de
l'orientation », annonce le directeur.
Renforcer l'accompagnement,
l'individualisation...
Le lycée possède déjà une seconde passerelle qui sert de tremplin aux
élèves de troisième en difficulté. A la rentrée prochaine, le lycée devrait
expérimenter pour les secondes « une semaine de bilan en milieu d'année
avec les parents, les enseignants... » Patrice Hauchard souhaite aussi
renforcer le volet langues en mettant en place des groupes de compétences.
« Toutes ces questions s'inscrivent dans l'amélioration du taux de
passage en première et dans l'amélioration de l'orientation à la fin du
lycée ». S'il ne sait pas encore de quels moyens supplémentaires il va
bénéficier, Patrice Hauchard voit dans cette expérimentation une chance pour
son lycée.
Édition du Ven 5 juin 2009
Les lycées examinés
Les indicateurs de résultats des lycées, mis en ligne aujourd'hui par le ministère de l'Éducation nationale, ne donnent lieu à un aucun classement. Les trois indicateurs reflètent une réalité complexe.
Pour
la
seizième année consécutive, le ministère de l'Éducation nationale met
en ligne
les indicateurs de résultats des lycées de la session 2008 du
baccalauréat.
Ces indicateurs sont établis à partir des résultats des élèves au bac,
mais également à partir des données relatives au déroulement de leur
scolarité : « Le taux de réussite au baccalauréat n'est pas le seul
indicateur de résultat des lycées. Les taux d'accès au baccalauréat et
la
proportion de bacheliers parmi les sortants permettent d'apprécier le
caractère
plus ou moins sélectif des établissements et le parcours scolaire des
élèves
depuis leur entrée au lycée jusqu'au baccalauréat », explique le
ministère.
Le ministère a en outre calculé la « valeur ajoutée » des
établissements, en tenant compte de leur offre de formation et des
caractéristiques de leurs élèves en termes d'âge, d'origine sociale et
de sexe.
Le parcours scolaire d'un élève dépend également du contexte dans
lequel il
évolue, la composition socio-démographique de chaque lycée a ainsi été
prise en
compte.
Coup
de
projecteur
sur la « valeur ajoutée »
Il
n'est pas question de classer les établissements, « le ministère
propose
un regard croisé sur les trois indicateurs et les « valeurs
ajoutées » correspondantes. L'ensemble de ces éléments donne une image
de
la réalité complexe que constituent les résultats d'un établissement ».
Les deux extraits de tableaux des lycées publics et privés sous
contrat
de l'académie de Strasbourg (nos infographies), montrent que le taux
brut de
réussite au bac pour chaque établissement doit être relativisé. « Les
taux
de réussite et d'accès de chaque lycée doivent être comparés à des taux
« attendus » qui tiennent compte des caractéristiques
socio-démographiques et scolaires des élèves qui le fréquentent. Ceci
permet de
dégager la « valeur ajoutée » du lycée et d'offrir une approche
relative de son efficacité », précise le ministère.
Ainsi, sur deux établissements ayant un taux brut de réussite au bac
identique, l'un peut avoir une « valeur ajoutée » par rapport au taux
attendu de + 3 et l'autre de - 3. Il faut également souligner que le
taux de
réussite du total des séries peut cacher de grandes disparités entre
les séries
L, ES, S...
Aussi, pour chaque établissement de France, le ministère publie sur
son site :
- Des tableaux des taux de réussite au bac par série avec les valeurs
ajoutées
et les références académiques et nationales.
- Des tableaux des taux d'accès de la seconde et de la première au bac
avec les
valeurs ajoutées (cet indicateur évalue pour un élève de seconde ou de
première
année de baccalauréat professionnel, la probabilité qu'il obtienne le
bac à
l'issue d'une scolarité entièrement effectuée dans le lycée quel que
soit le
nombre d'années nécessaire).
- Des tableaux de la proportion de bacheliers parmi les sortants, (cet
indicateur permet d'apprécier si un lycée accepte volontiers ou non de
garder
en son sein les élèves qui ne réussissent pas le baccalauréat à l'issue
de leur
première terminale).
Quand on vous disait que la réalité est complexe à mesurer.
Jean-François Clerc
Vous pouvez consulter les indicateurs à partir de ce matin 10 h : http ://indicateurs.education.gouv.fr
Édition du Mer 8 avril 2009
"L'absentéisme est un fléau et les solutions actuelles pour y
remédier ne fonctionnent pas." Déplorant ce constat, Xavier Darcos a annoncé le
recrutement de 5.000 agents pour alerter les familles sur l'absence de leurs
enfants à l'école. "De plus en plus d'élèves sont absents de manière régulière",
déplore le ministre de l'Éducation nationale dans une interview jeudi au Figaro , précisant
que "l'absentéisme mène au décrochage, qui conduit à l'échec scolaire, lequel
mine l'insertion professionnelle et sociale des jeunes".
Ces agents,
recrutés sous forme d'emplois aidés dans le cadre du plan de relance, dépendront
de l'Éducation nationale et commenceront leur mission en mars dans 215 quartiers
en difficulté. Ayant une fonction de médiateurs de la réussite scolaire, ce
"seront des personnes qui connaissent les quartiers et les familles". "C'est
important, car, géographiquement, les écoles, collèges et lycées de l'éducation
prioritaire sont plus touchés que les autres. Ils seront opérationnels dès le
mois de mars pour remplir leur mission", a souligné Xavier Darcos.
"Une réforme pas du tout appropriée" pour Aubry
Une
réponse "pas du tout appropriée à ce qu'on attend aujourd'hui de l'école" pour
la première secrétaire du Parti socialiste Martine Aubry, qui a réclamé "des
enseignants formés avec des classes moins nombreuses". "Une fois de plus, on
veut montrer du doigt l'école, comme on le fait avec l'hôpital. On commence par
les mettre en déficit, par retirer des postes et, ensuite, on explique que c'est
à cause d'eux que ça ne marche pas", s'est indignée la patronne du PS.
Cette mesure intervient alors que la colère gronde dans les étages de la
maison Éducation nationale. Après les nouveaux programmes, la réorganisation de
la semaine et les suppressions de postes, les évaluations cette semaine en CM2
ont encore accru la défiance des enseignants du primaire à l'égard du
gouvernement. Refus de centaines de maîtres d'école d'organiser l'aide
personnalisée, désobéissance pour les évaluations en CM2, occupations d'écoles
par des parents, grève prévue le 29 janvier après celle du 20 novembre qui avait
réuni au moins un maître d'école sur deux : le mécontentement prend des formes
multiples. Mi-décembre, confronté à la contestation des lycéens et au risque
d'un embrasement, Xavier Darcos avait décidé de reporter d'un an sa réforme du
lycée comme l'avait révélé lepoint.fr.
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