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Titre du blog : Blog des parents d'élèves APEPA lycée FREPPEL
Auteur : freppel
Date de création : 30-09-2008
 
posté le 11-11-2008 à 10:49:26

Lycée : le grand chambardement ou le maintien d’une certaine tradition ?

Ca y est ! Le ministre s’est enfin prononcé sur la réforme du lycée général et technologique (le lycée professionnel n’est pas concerné par cette réforme: il vit la sienne - passage progressif au bac pro en trois ans au lieu de quatre - depuis un an. Sur ce point, je vous renvoie à l’article que je consacre sur ce blog à cette question). Il l’a fait le mardi 21 octobre 2008, à l’occasion d’une conférence de presse. Depuis quelques semaines, des informations avaient filtré, qui avaient permis aux uns de se positionner par rapport à ce projet de réforme, aux autres de peaufiner le dit projet.

 Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas “une simple réforme de plus”, comme on en produit une tous les dix ans environ depuis un demi siècle. Non, là, on ne se contente pas de rebaptiser les filières, de remodeler l’architecture à la marge, d’introduire tel ou tel enseignement nouveau … C’est à un très grand bouleversement que nous assistons.

 Pourquoi une réforme du lycée ?

Les attendus de la réforme sont nombreux. Les autorités ministérielles avancent tout particulièrement la nécessité de mieux réduire l’échec actuel aux niveaux secondaire (près de 15% de redoublements en seconde, soit deux fois plus qu’en moyenne européenne, 150000 sorties par an du système d’enseignement secondaire sans aucun diplôme ni qualification professionnelle, médiocre classement des collégiens et lycéens français lors des études comparatives internationales portant sur leurs acquis…), et supérieure (près de 50% d’échec en premier cycle universitaire). Autre motif : introduire de la souplesse en matière d’orientation, en rendant possible des parcours d’études enfermant moins les élèves dans des “séries” (ES, L, S, STG, STI …) desquelles on ne peut plus guère sortir une fois qu’on y est entré . Enfin, compte tenu de l’évolution récente de l’enseignement supérieur (qui fonctionne sur des logiques d’enseignements modulaires semestriels, qui privilégie les capacités d’autonomie des étudiants …), faire de telle sorte qu’au lycée, les élèves soient mieux préparés qu’aujourd’hui à ces contraintes.

Une organisation pédagogique profondément remaniée

Dans le lycée actuel, les élèves sont dans des “groupes classe” pour un an. Ainsi par exemple, on est en 2008-2009 élève de la classe de première ES3 du lycée Carnot. Cette organisation pédagogique vit ses derniers temps. Désormais, les élèves seront dans des “groupes modulaires semestriels” de 3 heures par semaine chacun. L’unité de compte est donc désormais le semestre et  l’année sera divisée en deux temps successifs : de la rentrée septembre aux vacances de février, puis de la rentrée de ces vacances à la fin de l’année scolaire. Entre les deux, il est prévu une semaine banalisée qui devra être consacrés aux bilans (conseils), à l’orientation … Et pour chacun des enseignements, le programme sera conçu sur un semestre et non plus une année scolaire entière.

 Trois catégories d’enseignements seront proposées aux élèves :

1) Des enseignements généraux (de type “tronc commun”), qui seront donc imposés.

2) Des enseignements complémentaires au choix (de type “options” obligatoires, c’est-à-dire à choisir dans une liste proposée par chaque établissement, en fonction de son offre de formation)

3) Des formation complémentaires d’accompagnement de l’élève (soutien, approfondissement, accompagnement du projet d’orientation …).

Dans un tel scenario, il ne devrait plus y avoir d’options facultatives. Mais ce point reste en suspens au moment où nous écrivons ces lignes.

En ce qui concerne les “enseignements complémentaires au choix”, les élèves devront donc choisir leurs modules, un peu comme, dans la classe de seconde actuelle, on choisit les enseignements optionnels de détermination, ou dans le cycle terminal actuel l’enseignement de spécialité. Voilà pourquoi les élèves ne seront pas systématiquement dans une “classe”, au sens actuel du terme : ils le seront pour les enseignements de tronc commun, mais se répartiront dans des “groupes modulaires” différents selon les choix d’enseignemens complémentaires optionnels qu’ils feront. Or, ces derniers seront assez importants dans le lycée nouveau (il est par exemple annoncé qu’en seconde, ils en choisissiront deux par trimestre , donc quatre tout au long de l’année).

L’achitecture générale du nouveau lycée

Comme celui d’aujourd’hui, il sera divisé en deux cycles : 1) le cycle de détermination (classe de seconde), 2) le cycle terminal (classes de première puis terminale).

1) La nouvelle classe de seconde

Trois catégories d’enseignements seront mis en place :

a) 7 modules par semestre d’enseignements généraux (3H par semaine et par module) : français, LV1, LV2, histoire-géographie, mathématiques, sciences expérimentales (regroupant les actuels enseignements de SVT et physique-chimie), et éducation physique et sportive. Au total : 3 x 7 = 21 heures par semaine.

b) 2 modules complémentaires au choix (par semestre, soit quatre en tout) , répartis selon quatre “familles” (ou “dominantes) d’enseignements (chaque élève pourra “piocher” dans des familles différentes s’il le souhaite) :

* “famille humanités” : littérature française, langues et cultures de l’antiquité (latin/grec), langue vivante 3 (étrangère ou régionale), arts et histoire des arts.

* “famille sciences” : mathématiques, physique-chimie, sciences de la vie et de la Terre, informatique et société numérique.

* “famille sciences de la société” : sciences économiques et sociales, initiation aux sciences de gestion, histoire et géographie.

* “famille technologies” : initiation aux sciences de l’ingénieur et de la production, initiation aux sciences médico-sociales, technologies d’atelier et de laboratoire, design, initiation aux technologies de l’hôtellerie et de la restauration, activités physiques et sportives.

Si l’élève est déterminé à opter, en entrant en première, pour une des quatre “dominantes”  (ou “familles”) qui lui seront proposées (sciences, ou sciences de la société, ou humanités, ou technologies), il a évidemment intérêt à choisir ses quatre “enseignements complémentaires au choix” parmi ceux proposés dans la “famille” correspondante. Par exemple, un élève qui sait qu’il demandera à entrer dans une première “sciences de la société”, aura intérêt à privilégier les trois enseignements proposés à ce titre : ceux de SES, initiation aux sciences de gestion (en “modules de découverte”) et histoire-géographie en “module d’approfondissement”, et sans doute y ajouter un module d’approfondissement en maths ou de découverte en LV3 (ce ne sont que des exemples de stratégies possibles).

Mais rien ne lui interdit par contre de piocher dans des familles différentes, afin de tester plusieurs dominantes s’il est hésitant. En particulier, s’il a par exemple commencé en prenant deux enseignements complémentaires de la “famille sciences” au premier semestre, et que son projet le conduit à privilégier une orientation vers la dominante sciences de la société par exemple, il pourra, au deuxième semestre, opter pour SES et sciences de gestion par exemple. L’inverse est également possible.

c) 1 module semestriel obligatoire d’accompagnement de l’élève (donc deux sur l’année entière)  : ce module pourra comprendre une aide aux élèves en difficulté (soutien), de l’approfondissement pour certains, un accompagnement du projet d’orienation … Contrairement aux deux autres catégories d’enseignement, qui feront l’objet de programmes nationaux, ces modules d’accompagnement seront définis au sein de chaque établissement, en fonction du projet d’établissement, du public qu’il reçoit, de ses spécificités … ce module représentera 3h par semaine qui devront être inscrites dans l’emploi du temps de chaque élève.

Au total, chaque élève recevra 30 heures de formation par semaine (21 + 6 + 3). Par rapport à la situation actuelle, cela correspond à une réduction de l’ordre de 10%, qui placera la France un peu plus près (mais encore un peu au dessus) de la moyenne européenne.

2) Le nouveau cycle terminal :

Pour le moment, les informations disponibles sont relativement vagues. Elles devraient être plus précises d’ici la mi-décembre 2008. A la date d’aujourd’hui, les autorités ministérielles communiquent principalement sur la nouvelle classe de seconde, qui doit être mise en place dès la  rentrée prochaine (en septembre 2009). Quand aux classes de première et terminale, qui seront progressivement créées en 2010 puis 2011, les détails viendront plus tard, avant la fin de la présente année scolaire a-t-il été promis. Espérons que cette promesse soit tenue car pour les familles de troisième qui vont devoir faire des choix d’orientation, la pleine connaissance de l’ensemble des caractéristiques du lycée nouveau est évidemment chose essentielle.

Ce que l’on sait, c’est que quatre parcours seront proposés aux choix des familles, correspondant aux quatre “familles” d’enseignements complémentaires figurant en seconde :

1) Un parcours “sciences” (qui permettra de retrouver les grandes caractéristiques de l’actuel bac S)

2) Un parcours “humanités” (qui renvoie au bac L)

3) Un parcours “sciences de la société” (qui renvoie au bac ES)

4) Un parcours”technologies” (qui renvoie aux actuels baccalauréats STG, STI, STL, ST2S, STAV)

L’idée est que, tout au long des quatre semestres du parcours première/terminale, l’élève puisse bénéficier d’une moindre spécialiation qu’aujourd’hui, et donc soit à même de plus aisément se réorienter en cours de route s’il en ressent le besoin. C’est un beau principe, mais qui demandera bien sur  être clarifié.

 Le calendrier d’application :

Septembre 2009 : création de la nouvelle seconde

Septembre 2010 : création des nouvelles premières

Septembre 2011 : création des nouvelles terminales

Printemps 2012 : nouveau bac, dont on peut d’ores et déjà prédire une profonde rénovation, faisant normalement suite à celle du lycée, même si le ministre à annoncé qu’il ne toucherait pas à ce monument napoléonien qu’est le bac actuel. Sans doute voulait-il dire qu’il n’y toucherai pas lui même, ou si vous préférez, que d’ici là, il compte bien refiler la “patate” (très) chaude à un autre ministre de l’Education nationale.

Sont donc concernés : les actuelles familles dont les enfants sont scolarisés en troisième (et en amont du collège), mais aussi les éventuels redoublants de seconde. Et bien sur, tous les professeurs principaux de troisième, qui vont devoir , comme les conseillers d’orientation, actualiser leurs informations avant de conseiller.

Un projet moins ambitieux qu’annoncé au départ :

Depuis plusieurs mois, le Ministre, et tous ceux qu’il a mobilisé pour préparer cette importante réforme, annonçaient, parmi leurs divers objectifs, deux “cibles” importantes à leurs yeux : 1) diminuer la prééminence de l’actuel bac S; 2) accroître significativement la capacité de choix des élèves en leur offrant une part accrue d’enseignements “à la carte”, et donc, corrélativement, en réduisant le poids du tronc commun. Sur ces deux points, il y a objectivement régression par rapport à ce qui avait été annoncé précédemment.

1. Il semble bien qu’en ce qui concerne la future classe de seconde, on soit revenu sur l’objectif ambitieux qui consistait à ne plus en faire une sorte de propédeutique de la filière S. Rappelons que dans la seconde actuelle, avec la présence dans le tronc commun des mathématiques, de la physique-chime et des SVT, la filière S était la seule, je dis bien la seule, dont les enseignements nécessaires pour y entrer étaient intégralement inscrits dans les enseignements du tronc commun. Il était même possible de renforcer ce profil “pré-scientifique”, en ajoutant un enseignement de détermination de MPI ou ISI par exemple. Tel n’était pas le cas pour le bac ES par exemple, dont la matière fondamentale - les sciences économiques et sociales - étaient exclues (et le seront dans la nouvelle seconde) du tronc commun. Le projet de départ annonçait que seules les mathématiques figureraient désormais dans le tronc commun de seconde, les SVT et la physique-chimie étant renvoyées au statut de matières complémentaires optionnelles… comme bien d’autres disciplines d’ailleurs (les SES, les arts, le latin, le grec classique, les enseignements technologiques…). En cédant à la pression des associations de spécialistes  des professeurs de SVT et physique-chimie qui ne voulaient pas d’un tel scenario, le ministre à hélas rajouté un module obligatoire de “sciences expérimentales”, revenant sur sa position de départ, et réintroduisant de ce fait dans la future seconde rénovée le travers de l’ancienne : de ce point de vue, cette seconde soit disant rénovée ressemblera donc fortement à la précédente Ce sera encore une “machine” à inciter à s’orienter vers la dominante “sciences”, d’autant que dans les enseignements optionnels complémentaires, l’élève, qui aura la possibilité de choisir deux fois deux modules complémentaires (deux par semestre), se voit proposer : approfondissement en maths, SVT, physique-chimie, informatique et environnement numérique… n’en jetez plus ! Nous pensons donc qu’on a, sur ce point, renoncé à ce premier objectif et ainsi perdu une belle occasion.  Ce n’est évidemment pas cela qui va contribuer à modifier les représentations des familles, qui voient fréquemment dans la filière scientifique celle qu’il faut viser à tous prix !

2) Le projet de départ ne donnait au tronc commun que 65% de l’horaire global (sur un volume global pré annoncé de 27 h par semaine). Du coup, les familles bénéficiaient d’une part significative d’enseignements au choix, nettement plus importante que dans la seconde actuelle. En ajoutant un module de “sciences expérimentales” dans le tronc commun, le ministre écorne cet objectif, puisque le tronc commun représentera en réalité 70% du total horaire (qui passe donc à 30h par semaine). Il est certes vrai que le futur tronc commun sera moins important que dans l’actuelle classe de seconde, mais selon moi, on a raté l’occasion de faire un saut plus significatif, allant dans le sens de l’un des objectifs proclamés : accroître les capacités d’autonomie de ces derniers.

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Bruno Magliulo - L'étudiant -