Le SNES-FSU, principal syndicat du secondaire, a claqué hier la porte des négociations sur la réforme du lycée. Organisations divisées, lobbys offensifs... le jeu se tend alors que le ministère cherche à aller vite. Trois sujets émergent.
D'un côté, un ministre qui assure mordicus que « rien n'est arrêté », tout en menant sa réforme au pas de charge pour la faire débuter dès 2009. De l'autre, des syndicats et des lobbys disciplinaires offensifs, même s'ils mobilisent peu ces derniers temps, plus enclins au « chacun pour soi » qu'à l'« union sacrée » à deux mois des élections professionnelles. Entre rumeurs, stratégies et bras de fer, la réformedu lycée ressemble, à quelques semaines de sa présentation, à une partie de poker menteur. Hier, le SNES-FSU, principal syndicat du secondaire, a claqué la porte des négociations. La deuxième organisation, le SGEN-CFDT soutient, elle, toujours la réforme espérant qu'« aucun scénario noir » ne viendra troubler le jeu. Par le passé, des gouvernements ont en effet déjà cédé à la pression du SNES ou à la colère lycéenne. Xavier Darcos, habile tacticien et fin connaisseur, saura-t-il s'extraire de cette équation délicate ? Hier, il a annoncé vouloir poursuivre le débat. Tour d'horizon des sujets sensibles.
· L'allégement des horaires
Pour aligner les horaires des lycéens, parmi les plus lourds d'Europe, sur les standards internationaux, la réforme prévoit de ramener leur emploi du temps à 27 heures hebdomadaires contre 28 à 30 aujourd'hui. Un casus belli selon les partisans du « savoir » hostiles à un « lycée light », qui se recrutent à gauche (SNES) comme à droite (SNALC). « Sur trois ans, les lycéens perdront un trimestre de cours : ils auront un moindre niveau », déplore le SNALC, regrettant aussi la « logique d'économie ». Tel n'est pas l'avis du camp des pédagogues, qui brandissent l'exemple de la Finlande, où les élèves réussissent mieux malgré des horaires réduits. « L'important, ce n'est pas ce qui est dit aux élèves, mais ce qu'ils retiennent », fait valoir le SGEN-CFDT.
· La fin des séries
C'est une réforme structurelle d'ampleur : les élèves suivront une vingtaine de modules de cours de 3 heures hebdomadaires (facultatives ou obligatoires) et les anciennes séries (ES, L, S...) seront remplacées par des « dominantes » (sciences, humanités...). Un moyen d'accroître leur autonomie et de les préparer à l'université, fait valoir le ministère. Un risque d'accroître les inégalités sociales, rétorque le SNES, opposé à la disparition de la série technologique. « Si ce sont les élèves et non les professeurs qui décident, ce sera la prime aux mieux-informés », martèle-t-il. Il agite aussi le chiffon rouge du baccalauréat, estimant que le découpage en « semestres », entraînera l'essor du contrôle continu au détriment d'épreuves nationales. De quoi réveiller les lycéens déjà hostiles au projet en 2005. Prudent, Xavier Darcos les associe à la réforme, martelant que le sujet du bac sera abordé ultérieurement.
· Le poids des disciplines
Les lobbys disciplinaires sont à la manoeuvre. Selon le projet, certaines matières deviendront obligatoires et d'autres optionnelles, mais lesquelles ? En seconde, le tronc commun devrait comprendre des mathématiques, du français, des langues, du sport et de l'histoire-géographie, mais les sciences ou l'économie redoutent d'en être exclues. En première et terminale, il existera à côté du bloc « d'enseignements généraux » des cours de spécialisation et de soutien. Là aussi, les rumeurs les plus folles circulent. Lundi, Xavier Darcos a nié vouloir supprimer les mathématiques et l'histoire en première. Mais les lobbys, qui, au-delà du symbole, redoutent de perdre des postes (ils seront assujettis au choix des élèves), continuent leur pression. Ils avaient déjà réussi, en 2006, à édulcorer la réforme du socle commun au collège.